La communauté "Vivre Avec" est basée sur les témoignages de patients tels que Dorine, Jean-Pierre, Brenda... Tous ont été diagnostiqués d’un cancer du poumon. Comment ont-ils appris à vivre avec leur maladie ?
Découvrez ici les histoires, les idées et les opinions des différents témoins. Dans certains cas, vous pourrez peut-être vous retrouver dans leur histoire, mais dans d'autres, non. C'est tout à fait normal car chacun vit cette expérience à sa manière et vous ne pouvez pas vous identifier à tous les témoignages !
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L’histoire de Rosa
Rosa a 73 ans. Elle vit avec un cancer des poumons, mais ne se sent pas du tout malade. Son mari a de nouveau bon espoir que ça se passe bien.
On prend les choses comme elles viennent
J'ai toujours cru que quand on m'annoncerait un cancer, je n'arrêterais pas de pleurer. Mais quand on m’a réellement annoncé le diagnostic il y a dix mois, j'y ai réagi avec résignation en me disant : c’est comme ça, on va prendre les choses comme elles viennent.
D’abord une chimio, suivie d’une opération
Je toussais déjà depuis un an quand Jan, mon mari, a dit : « Tu devrais quand même aller faire examiner ça. » Sitôt dit, sitôt fait : on a pris rendez-vous chez un pneumologue. Ils ont fait une radio, et quand on a voulu sortir, il s’est avéré qu’ils avaient vu quelque chose et déjà appelé le docteur.
Le mercredi suivant, le docteur nous a appelés : il fallait faire des examens plus poussés. J’ai passé un CT scan, un PET scan, etc. et on a alors découvert que c'était malin. Il y avait plusieurs traitements possibles et ils m’ont donné le choix entre une chimiothérapie ou une opération. Bien sûr, je pouvais aussi choisir de ne rien faire. J'ai finalement opté pour la chimio et j'en ai été très malade. À un moment donné, je ne pouvais plus manger et j'ai perdu 7 kilos en une semaine. Ils ont alors dû arrêter cette chimio, puis ils m’ont opérée et m’ont retiré un poumon.
Je vis depuis avec un seul poumon et en fait, ça va très bien. On marche tous les jours et je peux encore tout faire.
Le bel automne devient un rude hiver
J'ai toujours été à ses côtés, dès le tout début, déclare son mari. Quand on a appris la nouvelle, c'était très difficile, bien sûr. Je m’en suis souvent fait un sang d'encre la nuit. Puis elle est effectivement tombée très malade. J’ai alors cru que je la perdais, que c’était la fin. On était au bel automne de notre vie et, d'un coup, on se retrouve en hiver, pour ainsi dire. Mais cela ne nous empêche pas d’essayer de tirer le meilleur parti de cet hiver.
Une journée sans marcher est une journée de perdue
On aime tous deux aller marcher, qu’importe la météo. C’est quelque chose qu’on peut faire ensemble. C‘est important, car en marchant, on parle de tout et de rien, et on résout nos problèmes. Cela nous rapproche. Une journée sans marcher est pour moi une journée de perdue. Même chose pour une journée sans rire. Après mon opération, le premier jour à mon retour, on est allé marcher cinq kilomètres. On en a fait plus chaque fois et hier, on a marché 22 kilomètres.
Bon espoir que ça se passe bien
On en est maintenant bien plus loin et on essaie de vivre à nouveau normalement, comme avant, explique Jan. Je lui ai aussi promis de continuer à tout faire pour elle. J'arrive maintenant à prendre un peu plus de recul par rapport à cela. Grâce au fait qu'elle ne baisse pas les bras, j'ai remonté un peu la pente et j'ai de nouveau bon espoir que ça se passe bien.
Je ne me sens pas cancéreuse
Quand la chimio m'a rendue si malade, je ne me suis sentie très mal qu’une seule fois. Tous les enfants étaient chez nous et moi, je n'osais pas me joindre à eux, de peur d’attraper autre chose. J'étais seule dans un coin, à en baver, alors que tout le monde était à table, à s'amuser et à discuter.
Mais là, je ne me sens pas du tout malade, comme si je n'avais pas de cancer. Je ne sais pas non plus si je suis palliative ou pas. Je n'ai jamais pensé que je n'y survivrais pas. Je n'y ai pas encore songé. Ce qui doit arriver arrivera. Je ne vais pas me lamenter dans un coin à propos de ce qui m'attend encore. Je suis peut-être malade, mais je veux tout simplement continuer à tout faire. Pas autrement qu'auparavant, continuer à aller de l'avant. Ne pas me laisser abattre. Je dois continuer et je veux guérir.
S’accrocher aux petites choses
Il est très important de faire savoir à sa partenaire que vous serez toujours là et vous ferez tout votre possible, conclut Jan. On se lève le matin, puis on part faire notre première promenade. On voit le soleil se lever, cette boule rouge... Ce genre de petites choses, c'est à ça qu'il faut s'accrocher.
L’histoire de Sophie
Il y a cinq ans, on a diagnostiqué à Sophie un cancer des poumons. La maladie en est au stade 4B, mais elle reste malgré tout positive.
Je prends les choses en main.
Dès le début, j’ai décidé de rester maître de ma maladie et de prendre moi-même les choses en main. Chaque fois que j’ai une mauvaise nouvelle, je la prends en main et je me dis : « Bon, voilà ce qu’il en est, on va donc faire ça. » Je me renseigne toujours tout de suite et j’étudie tout. Chaque fois, c’est moi qui prends le contrôle, je dirais. Et pour l’instant, ça me réussit. Je vais discuter avec mon oncologue et avec chaque médecin qui me suit. Même chose quand j’ai été opérée du cerveau : il fallait que je parle avec le médecin et l’assistante, que je sois bien sûre d’être chez le bon chirurgien. Vous savez, j’ai l’impression que je transporte cette maladie dans mon sac, mais pas en moi.
Continuer à avancer.
Je n’ai jamais fumé, mais il y a cinq ans, on m’a diagnostiqué un cancer des poumons. Mais je ne me laisse pas abattre par la maladie. Je n’ai jamais pensé : je vais mourir. J’essaie au contraire d’avancer et de vivre comme si je n’avais rien. J’ai bien sûr des rendez-vous réguliers avec le kiné et l’oncologue, et j’ai désormais un peu plus difficile qu’il y a cinq ans à cause des traitements. On prend des médicaments, on a de la chimiothérapie, on a des rayons… Le traitement est quand même assez lourd, mais malgré tout, je continue à avancer.
Pas de sieste pour moi.
La fatigue me joue parfois des tours. Comment je la gère ? Ça dépend des moments. Si je vais en vacances, je prends beaucoup le temps de me reposer et je lis beaucoup. Et quand je lis, parfois, je m’endors. En même temps, j’ai l’impression de devoir profiter de tout, et donc je ne me repose parfois pas assez. Alors là, je le sens. J’ai par exemple fait trop de choses ces dernières semaines. Je sens que je suis fatiguée, mais à la maison, c’est très difficile de se dire : « OK, je vais faire la sieste. » Ça ne marche pas comme ça, je ne sais pas retourner dans mon lit la journée.
Plus de temps pour réfléchir
La maladie m’a fait voir la vie sous un autre angle. Je suis maintenant bien plus attentive à plein de détails. Je suis entourée de la nature et d’animaux, et j’adore ça. Je profite pleinement de tous ces oiseaux et petits écureuils.Je suis plus sensible aussi à ce que peuvent vivre mes proches, et j’ai plus de temps pour réfléchir. Avant, je n’arrêtais pas de courir partout et mon travail m’accaparait, mais maintenant, je n’ai plus à m’en soucier. J’ai dû arrêter de travailler. C’était triste, mais je me suis tout de suite dit : « OK, c’est fini. » Je veux être positive dans la vie et j’essaie de ne pas me plaindre, de ne pas être négative.
Je me projette à chaque fois de trois mois
Je pensais que je n’allais pas tenir longtemps, que c’était une question de mois, même si les médecins ne pouvaient pas me donner de date définitive. La maladie en était déjà au stade 4B, et il n’y en a pas d’autre après. J’avais des métastases partout, et on sait alors qu’il n’y a guère de raisons de se réjouir. Mais j’ai été très rapidement d’accord avec les informations qu’on m’a données. Je savais que je n’en avais plus pour longtemps, que j’allais mourir. Donc les projets à long terme deviennent très difficiles. Je sais toujours me projeter de trois mois en trois mois, car j’ai mes examens tous les trois mois. Les choses que j’ai envie de faire, il faut que je les fasse dans cet espace de trois mois. C’est donc plus compliqué, mais jusqu’à présent, ça fonctionne.
Soutien
J’ai aussi de la chance d’avoir quelqu’un de très fort à mes côtés. Que j’aimerais parfois un peu plus sensible, mais ce n’est pas facile non plus pour lui. Quand j’ai quelque chose ou quand je veux me plaindre de quelque chose, c’est toujours à la personne avec qui je mange, à la personne qui est là. Et c’est toujours lui. Ce doit être très difficile d’être le partenaire de quelqu’un qui a un cancer.
Voir ce qu’il y a de positif
Si j’ai un conseil à donner à d’autres qui ont la même maladie que moi ? Je ne peux que dire comment j’aborde la chose : regardez autour de vous, essayez de voir ce qu’il y a de positif. Et il y a plein de choses positives. La nature, par exemple. Regardez le ciel, regardez les nuages. Profitez un maximum de la nature, parce que, pour moi, c’est la plus belle chose qu’on nous ait donnée.
L’histoire de Christiane
Christiane a 78 ans et vit depuis 15 ans déjà avec un cancer du poumon. Une maladie qu’il ne faut pas prendre comme une catastrophe, selon elle.
Il y a sept ans, Christiane avait déjà été interviewée à propos de sa maladie. Elle avait alors déclaré : « Je ne peux plus être opérée. Je n’ai plus assez de poumon pour qu’on puisse encore m’enlever un morceau. Alors je prends la vie comme elle vient. Voilà. »
Le diagnostic et le traitement
En 2008, ils m’ont diagnostiqué un cancer du poumon et m’ont retiré une partie du poumon. Ils avaient ensuite envisagé de me faire suivre une chimiothérapie. J’étais en clinique en vue de faire la première séance quand on est venu m’annoncer qu’on allait plutôt faire un traitement par voie orale, sans doute suite au prélèvement.
Je suis bien suivie, mais je fais aussi tout ce qu’on me demande. Je prends ainsi consciencieusement ce fameux médicament tous les jours, à une heure bien fixée. Et tous les trois mois, je passe au scanner et ils évaluent mes fonctions respiratoires. Ils me font aussi des prises de sang régulièrement.
Activité physique et voyages
Mon calendrier d’activités est largement déterminé par ma santé et tout ce qui y a trait. Pour le moment, je me sens bien, mais ne me demandez pas de marcher. Si je dois marcher vite, je suis alors essoufflée et je ne peux pas tenir longtemps. Mais si je peux le faire à mon allure, j’y arrive encore. Je peux alors me balader une heure, ou peut-être deux.
On a quand même encore pas mal voyagé depuis 2016. On a même fait une croisière. Chaque année, on prend des vacances et on part. Je profite encore comme avant, finalement.
Projets d’avenir
Quand je pense au futur… Vous savez, j’aimerais encore vivre un peu pour pouvoir réaliser mes projets. Uniquement ça. J’aimerais encore aménager deux appartements qui m’ont été livrés casco et pour lesquels il faut que je trouve les corps de métier. J’aime ça. C’est uniquement ça que j’ai en projet.
Je me sens bien
Après quinze ans de cancer des poumons, je dois avouer que je me sens très bien. Je n’ai aucune douleur, rien. Si je n’étais pas si bien suivie, je ne serais plus là. C’est une maladie qu’il ne faut pas prendre comme une catastrophe. En effet, il y en a beaucoup qui ont des cancers. Tout le monde a peut-être son petit cancer qui dort.
En tous les cas, je pense que pour ceux qui vivent, comme moi, avec un cancer non à petites cellules, il ne faut pas s’alarmer. Plus la recherche progresse, plus on trouve des médicaments. Celui que je prends, en tout cas, semble agir très bien. Je mourrai peut-être d’autre chose que du cancer, qui sait.
L’histoire de Dorine
Interview réalisée en septembre 2021
Dorine Snoeck (61 ans) a eu un cancer du col de l'utérus et du sein et elle a un cancer du poumon depuis un an avec une métastase à la tête. Cette tumeur a été enlevée. Redevenir libre du cancer ? Cela n’est plus possible. Mais profiter de la vie ? C'est tout à fait possible, a résolument décidé Dorine.
“A quoi sert de vivre encore longtemps, si je continue à avoir peur tout le temps ? Alors ça ne me sert à rien, hein.“
Le 9 juillet de l'année dernière, je suis allée aux urgences parce que je ne pouvais plus parler. Là, ils ont vu qu'il y avait une tumeur dans ma tête. Je devais rester, mais j'ai été autorisée à rentrer chez moi le week-end. A ce moment là, je ne savais pas que j'avais un cancer du poumon.
Quelques jours plus tard, j'ai du passer un SPECT-scan et le lendemain, une biopsie de mes poumons. La chirurgie de ma tête a été arrangée dès que possible. Une semaine après mon opération, j'ai dû aller chez le pneumologue, ce n'est qu'à ce moment-là que j'ai appris que c'était une tumeur maligne.
Quand ils m'ont dit que ça provenait en fait de mes poumons, j'ai quand-même eu un choc. Puis je suis allée voir mon médecin et elle m'a dit : 'Je vais le dire sans détour: on ne peut pas le guérir complètement, mais on peut l'arrêter.' J'ai demandé : « Est-ce que je vais mourir ? » Elle m'a dit : "Non, tu peux vivre longtemps avec ça." Je n'ai pas osé demander : "Combien de temps encore ?" Je ne pense pas qu'ils puissent coller un nombre d’années là-dessus.
Je n'étais pas vraiment sûre à 100 % qu'il s'agissait d'un cancer du poumon jusqu'à ce que j’ai vu le pneumologue. Alors tu repenses : je vais mourir. C'était déjà la troisième fois. Et à chaque fois tu penses : je vais mourir. Je me suis remise, je n'ai pas pleuré. J'ai presque commencé à pleurer quand elle a dit que j'avais besoin d'une radiothérapie. Parce que j'avais tellement peur de ce masque. Eh bien, je dois dire : ça s’est très bien passé.
J’ai fumé. De mes 14 à 27 ans. Alors, mon mari m'a dit : « Je n'ai pas besoin de cadeau pour le nouvel an, mais j'aimerais que tu arrêtes de fumer. » Et j'ai fait ça. Grâce à ce fait, ces pilules fonctionnent. Maintenant, mes poumons sont libres de fumée. Si cela n'avait pas été le cas, j'aurais dû commencer la chimio à baxters immédiatement.
Les deux premiers mois ont été les pires. Parfois, j'ai encore des douleurs, mais c'est gérable. Tout le monde a parfois mal, hein... Mais c'est une douleur différente.
Le matin, mon réveil sonne, mon verre d'eau est prêt et je prends ma pilule. Je suis très stricte là-dessus. Je prends cette pilule dans ma main et lui dis : "Ma pilule de chimiothérapie, je te dois ma vie." Et je crois que si je dis cela tous les jours, elle fonctionnera beaucoup plus longtemps.
ÉMOTIONS
Je suis toujours très positive. Pour mes petits-enfants. Ma plus jeune petite-fille n'est qu'une petite fille de deux ans ! Je veux la voir grandir, je veux faire du shopping avec elle, je veux tant de choses. Avec les autres aussi, bien sûr, mais cette petite n'a que deux ans... Voilà pourquoi. Parce que la vie est belle. Parce que je veux rester longtemps ici. Autant que possible, je fais ce que j'aime faire. En fait, je profite de chaque jour, de chaque instant.
Je suis heureuse quand le matin arrive. Lorsque tu te réveilles la nuit, c'est la première chose qui te passe par la tête. J'ai eu très peur au début, je dois l'avouer. J'avais aussi peur pendant la journée, j'avais toujours cette peur qui me serrait la gorge. Alors j'ai dit : ça ne peut pas continuer comme ça, je n'ai plus de vie. Je dois tourner ce bouton, je dois profiter. A quoi sert de vivre longtemps si je continue à avoir peur tout le temps ? Alors ça ne sert à rien, hein.
J'avais l'habitude de lire beaucoup de livres sur le sens de la vie, sur la mort et sur ce qui reste après la mort. Ou pas. Je n'avais pas peur de mourir, alors. Mais lorsque tu es confrontée au cancer, tu commences à y réfléchir davantage. Si tu dois mourir, est-ce que ça fera très mal ? En fait, il ne faut pas trop y penser, ce n'est pas bien. Mais ce n'est pas toujours facile, bien sûr. Parfois tu le fais, mais ensuite je repousse ces pensées. Je verrai bien quand le moment arrive.
SUPPORT
La photo qui me donne la force de continuer est celle de mes trois petits-enfants. Et puis, bien sûr, il y a mes fils et mes belles-filles. Et mon mari, parce qu'il fait beaucoup pour moi. On oublie combien il fait pour moi. Je n'ai pas une seule photo de nous ensemble. Donc pour moi c’est celle des enfants. Ils sont encore petits et je veux les voir grandir. C'est extrêmement important.
Mon mari est très calme, même s'il a parfois beaucoup de stress à l'intérieur. Tous ses frères et sœurs me disent 'tu as le meilleur'. Le plus courageux de tous. C'est vrai. Il fait tout. Il est là pour moi. Si j'ai un problème ou besoin de pleurer, il est là. Il écoute. Il fait aussi beaucoup dans le ménage, depuis que j'ai eu un cancer du sein.
Lorsque j'ai découvert que j'avais un cancer du poumon, j'ai créé un groupe sur Facebook, Samen Sterk’, pour mes amies et mes connaissances. Au début, je l'ai fait principalement parce que je ne pouvais pas parler au téléphone, mais je le fais toujours après un an. Il ne s'agit pas toujours de ma maladie, mais aussi de ce que je fais et du fait que je suis positive. Pourquoi via Facebook ? Ce n'est pas parce que j'en ai honte, j’en parle aussi quand je vais au magasin. Cela fait partie de mon processus de traitement. J'ai besoin de pouvoir en parler. Parfois, j'entends des gens qui réagissent dans ce groupe : « Wow, t'entendre parler comme ça me donne du courage, tu es tellement positive. » Mais j'ai juste besoin d’en parler, pour le traiter. C'est bien que je puisse transmettre cela à d'autres et partager ma positivité.
En fait, j’ai créé Samen Sterk pour tous mes amis. Maintenant, j'y poste des messages tous les jours, également pour d'autres patients atteints du cancer. On s'envoie parfois des messages via Messenger, pour se donner du courage. Si l'un d'entre eux a de moins bonnes nouvelles… on s’encourage.
COURAGE
“Cette chanson me donne du courage.”
Connaissez-vous Jerusalema ? J'adore entendre cette chanson, ça me donne du courage. Quand je devais aller chez le pneumologue pour savoir si c'était cancéreux, j'écoutais cette chanson tout le temps dans la salle d'attente.
J'aime défendre quelqu'un qui a moins de chance et je fais du bénévolat. Pour cela, j'ai reçu un trophée de 'Femme de l'année' de la plateforme 'Yunomi'. J'en suis fière. J’ai ça dans la peau et je le fais toujours. Moins, depuis que je suis malade. J'aime aider les gens. Par exemple, je soutiens les gens dans un petit village du Kenya. Ils vivent du tourisme et n'ont plus aucun revenu. Je leur donne des choses à vendre au marché aux puces, et ils gagnent un peu d’argent. Ils font de bonnes choses avec ça. Ils ont construit une petite cuisine près de l'école. L'année dernière, quand j'ai été opérée, j'ai reçu une vidéo d'enfants au Kenya dansant pour moi sur cette chanson de Jerusalema. Ça m’a très émue, comme ils se tenaient là avec cette bannière portant mon nom… Vraiment. Cela m'a profondément touchée.
DÉTENDU
J'adore tricoter et crocheter. J'ai commencé à crocheter et à tricoter des vêtements Barbie, puis j'ai commencé à travailler le tissu. J'ai une chambre de loisirs à l'étage où je m’amuse. L'hiver dernier, j'ai tricoté et vendu beaucoup de bandeaux pour 'Kom op tegen Kanker'. J'ai collecté 450 euros alors que je vendais les bandeaux à 5 euros. C'est bien de se changer les idées parfois. J'aime être créative, alors je ne m'inquiète pas autant. Je suis aussi heureuse quand je vois ou entends une amie, j’aime discuter un peu et m'amuser. On ne doit pas toujours penser à cette maladie, n'est-ce pas. Si tu fais ça tout le temps, tu deviens fou.
SE SOIGNER
“Fais-toi belle si tu as un cancer."
Je pense qu'il est très important que tu prennes toujours soin de toi, que tu te fasses belle quand tu as un cancer. Par exemple, je ne sortirai pas sans rouge à lèvres, sans bague... La semaine dernière, j'ai dû aller à l'hôpital pour faire un laser des aphtes dans ma bouche, qui me dérangent beaucoup. Nous étions dans la voiture, juste en train de partir, et j'ai dit à mon mari : « J’ai oublié de mettre mes boucles d'oreilles ! « Ce n'est pas grave, devons-nous vraiment rentrer à la maison pour ça ? » Quand même, oui. Je pense que c'est important.
FUTUR
Tant que mes pilules fonctionnent, je vais bien. Je peux danser. Non, être libre de cancer n'est plus possible dans ma vie. J'ai quand-même des moments... comme la fête des mères. J'étais chez mon fils aîné et je lui ai dit : 'Allons, prenons une photo ensemble.' Mon plus jeune a répondu : 'Maman, je veux aussi prendre une photo avec toi.' Il a pris une photo et encore une... “Et celle-ci aussi”, dit-il. Il m'a fait un bisou sur la tête, les yeux fermés ; il est plus grand que moi. Quand je regarde cette photo, c'est très contradictoire : je suis heureuse parce qu'ils m'aiment tellement. Mais j'ai aussi peur de ne pas vivre longtemps. Quand tu es tellement confrontée au fait que tes garçons t'aiment tellement, qu'ils seront très tristes quand tu ne seras plus là... C'est à de tels moments que je me rends compte : tu as deux choix. Ou tu t‘assois dans un coin et tu pleures, mais alors ta vie n’a plus de sens. Alors j’opte pour le deuxième choix: je profite de chaque jour. Comme maintenant. J'apprécie tout.
Bien sûr, je veux vivre très longtemps. Je n'ai que 61 ans, je ne pense pas que ce soit vieux. Il y a cette peur : ça ne reviendra quand-même pas, hein ? Parce que tu sais : il se peut que ces pilules ne fonctionneront plus un jour. Et alors, mes options diminuent. Mon médecin m'a dit ce qui serait encore possible : la chimio à baxters, l'immunothérapie ou une combinaison des deux.
Comment je vois mon avenir ? C'est difficile. J'aimerais vivre longtemps, mais on ne le sait pas. En gros, je fais tout ce que j'avais l'habitude de faire. Ma vie n'a pas changé. Si, elle a beaucoup changé, mais pas pour ce que je fais. Tu dois apprendre à vivre avec le cancer que tu as. Il faut juste apprendre à vivre avec.
L’histoire de Jean-Pierre
Interview réalisée en juillet 2021
Jean-Pierre Derantere (60 ans) a un cancer du poumon. Il a subi une chimiothérapie et est actuellement en rémission. Il est sous immunothérapie.
“Ma vie est deux fois plus dure, mais je reste en vie, je reste actif ! Pourquoi devrais-je devenir passif parce que j'ai un cancer ?"
J'ai été admis parce que j'avais des problèmes de digestion, mais aussi une toux. Il s'est avéré qu'il s'agissait d'un cancer du poumon. Mon médecin a dit : « C'est grave. » J'ai demandé quelles étaient mes chances. Mon médecin a été clair : « Cinquante pour cent de chances de survie, cinquante pour cent de chances de mourir. C'est un type agressif de cancer que vous avez.
Mon foie a également été touché. Mon médecin m'a dit: si je n'arrive pas à trouver un moyen de ramener votre foie à la normale, c'est fini.
En ce moment, les choses se passent bien. Mes marqueurs tumoraux ont chuté, j'ai eu besoin de six chimios pour arriver à ce résultat. Mon pronostic est toujours bon. En termes de traitement, je reçois désormais une immunothérapie toutes les trois semaines et entretemps une consultation avec mon oncologue, avec une prise de sang à chaque fois pour voir si mes marqueurs restent bons.
ÉMOTIONS
Bien sûr, il y a cette fatigue intense. Mais plus tu y penses, plus elle devient lourde. Et plus elle devient lourde, plus cela devient important dans ta vie, d’une façon négative. Ta maladie prend alors le dessus. Ça ne sert à rien de se plaindre. Ensuite, à long terme, tu ne penseras plus qu'à ça, peut-être jusqu'à en mourir.
Il y a des moments où j'ai été très malade. Des moments où j'ai cru que j'allais mourir. D’énormes coups de fatigue en pleine journée, comme si j'avais travaillé trois jours de suite, presque sans dormir. Même si je n'avais travaillé qu'une demi-journée. Ma vie est deux fois plus dure, mais je reste en vie, je reste actif ! Pourquoi devrais-je devenir passif parce que j'ai un cancer ?
Une journée parfaite pour moi ? C'est un jour où ce cancer se tait, ne me dérange pas trop. C'est une journée où je peux être actif – à la maison ou au travail – de manière responsable, correcte, sans symptômes. Cela peut signifier : travailler à la maison avec mes animaux. Ou prendre le temps de jouer au golf un jour. Être assis sur un banc dans le parc devant chez moi. Une journée où je suis détendu et où je peux bien dormir la nuit.
Ma vie est devenue plus compliquée qu'avant, mais je cherche comment je peux la simplifier dans toute cette complexité. Je pense que j'ai commencé à voir les choses d'une manière beaucoup plus simple, parce que je me concentre plus sur l’essentiel.
Je préférerais continuer à vivre une vie active, je veux célébrer la vie. C'est ce que je veux viser, même quand je suis fatigué. Ce ne sont pas les autres qui sont fatigués. Si je le suis, c'est à moi de l'accepter. Il y a bien sûr un danger à cela : tu peux commencer à croire que tout va bien. La réalité est que j'ai un cancer.
VIVRE AVEC LE CANCER
“Ma vie est devenue beaucoup plus intense.”
Ma vie est devenue beaucoup plus intense depuis que j'ai un cancer, mais aussi beaucoup plus complexe. J'ai l'impression que quelqu'un me ralentit, me tire constamment en arrière. C'est l'effet du cancer. Les choses qui me donnent l'énergie de faire quelque chose maintenant sont exactement les choses que j'ai faites quand j'ai appris que j'avais un cancer et que je ne survivrais peut-être pas. Observer les gens, la nature, la vie : tu la regardes en spectateur, un peu plus passivement, à distance. Mon dieu, ils seront toujours là quand je serai parti. Les arbres fleuriront année après année et perdront à nouveau leurs feuilles quand je serai parti. Tout continue. Cela m'a fait comprendre que la vie est plus forte que la mort. La vie reste toujours. Cela me donne envie de résister.
Les animaux sont importants pour moi parce qu'ils représentent pour moi la vraie vie. Des animaux, plus qu'un arbre par exemple. Un arbre n'a pas d'émotions, un animal en a. J'aime être avec mes animaux, voir comment ils réagissent... Qu'ils me regardent simplement avec ce regard de "tu es toujours là, heureusement, parce que si je ne t'avais pas, où serais-je ?" Voilà. C'est tout, mais c'est important, ce regard. Cela m'enchante. Cela me permet de rester dans l'instant, avec les choses que je fais.
Après mon diagnostic, je me suis isolé. Bien sûr, j'ai informé mes proches. Ma mère, mon beau-frère... Mon frère, il était fantastique, il est venu tout de suite. Nous en avons parlé le plus calmement possible, mais ils sentaient bien que je m'installais un peu sur mon île. J'observais passivement. J'ai essayé de voir l'importance de la vie autour de moi. Des gens autour de moi, de vivre dans la nature. La vie qui n'était pas la mienne, mais qui se déroulait devant moi. Pour essayer de rassembler l'énergie positive dont on a besoin pour vaincre le cancer. Mais c'était aussi... J’ai dû dire : 'Tu as un cancer, tu devras vivre avec. Pas les autres.' Parfois, cela allait encore plus loin. ‘Tu as fumé, c'est de ta faute. Tu aurais dû arrêter plus tôt ou tu aurais dû avoir le courage d'arrêter...’ On fait ses propres choix et on doit vivre avec.
La mort fait partie de nous, accepte-la. Parce que 'accepter' est un grand mot. J'entends par là : accepte que ce soit ton problème, même s'il semble insurmontable. C'est mieux de l'accepter que de vivre dans la peur.
En ce qui concerne mon avenir, je voudrais qu'il soit positif, détendu, mais bien conscient de tout. La vie la meilleure possible que je puisse vivre.
FAMILLE
“Mon frère est fantastique. Il me donne son énergie et son courage.”
Dès que tu es en pleine chimio, tu n'es pas comme moi maintenant, pendant cet entretien : tu es extrêmement affaibli. Tu as constamment besoin de force. Alors ta famille compte, tes animaux à eux seuls ne suffisent plus. Comment te comportes-tu vis-à-vis de ta famille ? Tu es toi-même un pilier brisé et tu demandes à être soutenu. C'est pourquoi il est si important que je puisse compter sur mon frère : si quelque chose ne va pas, il passe immédiatement à l'action.
Pendant ma chimio, j'ai besoin de mon frère, du soutien qu'il m'apporte. Énormément. J'avais besoin de quelqu'un pour me donner son énergie et son courage comme cadeau.
TRAVAIL
J'ai décidé de renoncer à la caisse d'assurance maladie, mais de reprendre le travail, pour les 36 heures entières. Heureusement que je peux le faire à mon âge. Je ne le regrette pas. Cela me permet à nouveau de me retrouver parmi les gens, d'être à nouveau en pleine vie. Bien sûr, il y a cette fatigue. Vous ne pouvez pas gérer un travail avec beaucoup de pression. J'ai la chance d'avoir un ami génial qui m'a donné un travail avec beaucoup de liberté et peu de pression, un travail que je peux gérer. Bien sûr, on n'a pas toujours cette liberté.
Je suis désolé de le dire, mais le fait que je sois retourné au travail me donne le soutien financier dont je pourrais avoir besoin à l'avenir, pour les difficultés que ma maladie peut entraîner.
Je suis fier d'être toujours là, dans ma situation actuelle. Quand j'ai dit à l'hôpital où j'ai été soigné pendant tant de semaines que je n'allais pas à la caisse d'assurance maladie, mais que j'allais travailler, ils m'ont applaudi.
Le travail sert à quelque chose. Quand vous travaillez, vous n'avez pas à attendre, vous ne vivez pas dans la salle d'attente. Vous êtes actif.
DÉTENDU
Je crois que pour bien vivre avec les autres, avec tes problèmes intérieurs, il faut bien se comprendre. Le yoga est un excellent outil pour cela, pour se détendre.
Je joue aussi au golf. C'est une forme d'exercice qui ne peut pas être mauvais pour votre corps. Cela me permet aussi d'être connecté à ce en quoi je crois : la pleine nature. Une heure, deux heures et je rentre à la maison complètement détendu.
CROIRE
Je n'en ai pas honte : je me suis tourné vers la foi. Parce que quand tu entends que tu pourrais mourir : c'est intense. Cela crée une guerre intérieure, tu te bats avec toi-même. Oui, ma foi m’a soutenu et j'y crois toujours. Quand tu regardes les êtres vivants, tu vois Dieu en eux. Cette lumière, cette vie qui continue, sera plus forte que la mort. Ce n'est pas une question de croire ou ne pas croire, tu peux le voir : il y a quelque chose qui t’aide à traverser une journée dure, difficile et douloureuse.
Il y a quelque chose qui peut te faire sentir, peu importe à quel point tu te sens faible ou mal – parce que le cancer est dévastateur, c'est dur, cela demande beaucoup d'énergie lors de ces premières chimios – que tu continues à croire que c'est possible. Dieu donne l'espoir. La conviction que tu es encore là pour une raison.
L’histoire de Brenda
Interview réalisée en janvier 2021
Brenda, qui est âgée de 52 ans, lutte depuis dix mois déjà contre un cancer pulmonaire et glandulaire métastasé. Ayant subi entre‐temps quatre séances chimio et 27 séances de radiothérapie, elle suit actuellement un traitement avec de l’immunothérapie. Cette thérapie n’agit pas directement sur la tumeur, mais elle revigore le système immunitaire lui permettant à nouveau de détecter et d’attaquer des cellules cancéreuses.
“Par les médicaments que je dois prendre, je suis confrontée chaque jour de nouveau à mon cancer. Ce sera pour toujours, puisque ma tumeur ne peut être éliminée.”
Comment le cancer a-t-il été découvert ? Je souffrais d’une fatigue anormale et je toussais souvent. Les sirops contre la toux que j’achetais, ne me soulageaient pas. Finalement, je me suis rendu chez le pneumologue. Celui‐ci a découvert une tumeur dans mes poumons.
Sur le scanner, le pneumologue a découvert une tumeur de 7,5 cm. « Elle devait y être depuis pas mal de temps. La tumeur a été examinée et deux semaines plus tard, on m'a dit qu'elle était maligne. J’avais un cancer métastatique du poumon et des glandes », raconte Brenda.
J’ai eu quatre séances de chimio et 27 de radiothérapie. J’en étais très malade et je suis très vite fatigué. Il me suffit de faire la vaisselle pendant une demi‐heure pour être épuisée.
Le médecin a prévenue Brenda qu’elle avait un risque de 95 % de perdre ses cheveux à cause de la chimio et de la radiothérapie. « Finalement, je n’ai jamais perdu mes cheveux. Et j’en suis tellement heureuse », dit Brenda en rayonnant de joie.
ÉMOTIONS
"Je ne croyais pas que j’étais malade"
Incrédulité… Voilà le sentiment qui me dominait lorsque j’ai appris la nouvelle. Je ne me sentais pas malade et je ne croyais donc pas que j’avais une tumeur dans mes poumons, que j’avais un cancer. Il m’était impossible de l’accepter. « Le médecin me disait : ‘C’est pire que tu ne le fais croire, Brenda. Tu es malade, mais tu refuses de l’accepter !’. Il avait raison.
À cause des médicaments que je dois prendre chaque jour, je fais face à mon cancer tous les jours. Il en sera ainsi pour toujours, car ma tumeur ne peut être enlevée. En attendant, j'ai appris à l'accepter.
J'ai beaucoup de peur. Peur de mourir. Chaque matin, quand je me réveille, je suis si heureuse d'ouvrir les yeux ! Mon médecin m'a dit que si ma tumeur pouvait être enlevée, psychologiquement, je ne serais pas si préoccupée par "mourir". Heureusement, je peux très bien en parler à mon psychologue.
FAMILLE ET AMIS
Dans les bons et les mauvais jours
Mon copain signifie tout pour moi. J’ai besoin de lui. Il a eu du mal à gérer cette situation et a également consulté un psychologue pour cela. Pour lui, il était très difficile de faire face au fait que j'avais un cancer. C'est encore maintenant. Mais nous pouvons bien en parler ensemble. Il est toujours là pour moi. Depuis le jour où nous avons su que j'avais un cancer, il est resté à la maison pour s'occuper de moi. Et cela pendant cinq mois !
Ma famille est très importante pour moi. Au début, ils étaient très tristes du fait que j’avais un cancer et ils craignaient que j’allais mourir. Mais à présent, on ne voit plus que je suis malade. Ils ne pensent plus que je suis malade et ne me demandent plus comment je vais. Et c’est tant mieux ! Je ne veux pas qu’ils me plaignent trop ni qu’ils soient tristes. Mais ils sont vraiment là pour moi !
SANTÉ ET FORME
"J’ai immédiatement arrêté de fumer"
J’ai fumé pendant 37 ans. De l'âge de 14 ans à 52 ans. Maintenant, quand je vois des gens fumer, je pense toujours que ça sent bon. Il m’arrive encore d’avoir envie de fumer, mais je ne le fais pas. Dès que j’ai appris que j’avais un cancer pulmonaire, j’ai immédiatement arrêté de fumer.
J’ai eu quatre séances de chimio et 27 de radiothérapie. J’en étais très malade et je suis également très vite fatigué. Il me suffit de faire la vaisselle pendant une demi‐heure pour être épuisée.
FINANCES
Le fait d’être malade et d’avoir besoin de soins a des conséquences financières. Pour Brenda aussi, la maladie est une importante charge financière. « Maintenant que je ne peux plus travailler, je dépends d’une allocation. Je ne reçois donc pas le même salaire mensuel qu'avant. Je gagnais 1 600 euros par mois et j'avais en plus des chèques-repas. Maintenant, je dois me contenter de 900 à 1 000 euros par mois, sans chèque repas ni prime. Mon copain m'aide à joindre les deux bouts. Mais s’il était possible, je reprendrais le travail dès demain. Rien que pour l’argent.
À cause de la chimio et de la radiothérapie, Brenda avait 95 % de chances de perdre ses cheveux. “Quand j'ai entendu ça, je suis allé chercher une perruque. Mais cela coûte rapidement plus de 1000 euros. Vous récupérez 150 euros de la mutualité, mais 1000 euros c'est vraiment beaucoup d'argent ! J'ai fini par ne pas perdre mes cheveux. J'étais si heureux.”
PERSPECTIVE D’AVENIR DE BRENDA
"Profitez des petites belles choses"
J'apprécie beaucoup plus les petites choses. J'avais l'habitude de travailler beaucoup, mais maintenant j'essaie de profiter de quelque chose chaque jour. Même si c'est juste un tour dans ma voiture ou ma belle maison. Par exemple, je vais maintenant chez le pédicure et le manucure et je fais soigner mes pieds et mes mains. Je ne faisais pas ça avant.
Je voudrais voir l’avenir en rose, mais... Je ne cesserai pas de faire des projets, mais au fond de moi, je me dis parfois ‘espérons que je serai encore là.
L’histoire de Johan
Interview réalisée en juin 2019
Johan a 63 ans et il est un homme de peu de mots. Pas vraiment bavard, donc. Il tient néanmoins à parler de son cancer.
“Avant ma maladie, je n’aurais jamais osé parler si ouvertement à une personne que je ne connaissais pas. Mais j’ai changé, j’ai fait une volte-face. Alors que, jadis, je ne m’arrêtais pas à ce qui se passait dans ma vie, je le fais bel et bien maintenant. Ce n’est pas exagéré de dire que je suis devenu un autre homme.”
Je devais subir une petite opération au gras du bras. Rien de grave, mais après l’intervention, je ne regagnais pas rapidement l’usage de la voix. On pensait que mes cordes vocales avaient été lésées par les conduites de l’insufflateur pendant l’anesthésie. Le médecin a donc jeté un coup d’œil sur mes cordes vocales, mais comme celles-ci ne présentaient rien d’anormal, on allait voir un peu plus loin… dans les poumons. Et là, les choses étaient moins bonnes. Puis tout allait très vite…. tellement vite que je comprenais moi-même à peine de quoi il retournait. J’étais abasourdi. Quelques jours plus tard, je comprenais déjà que les nouvelles étaient mauvaises.
J’ai demandé au médecin de ne pas tourner autour du pot. Je préférais recevoir la nouvelle en pleine figure plutôt que dans mon dos ! Et il a dit la simple vérité. Le diagnostic était clair : un cancer du poumon, mais qui n’était pas encore métastasé.
J’ai de mauvais souvenirs de cette première période de la maladie. C’est surtout de la ponction pulmonaire dont je me souviens. Elle fut très douloureuse. À l’aide d’une aiguille plantée dans mon dos, on a prélevé du tissu de mes poumons. Sans anesthésie ! Les premières sessions de la chimiothérapie furent désagréables. J’avais le cœur soulevé, j’étais fatigué, incapable de manger... Certains jours, j’avais des hallucinations. J’étais un cadavre vivant. C’étaient mes jours les plus sombres. Je perdais en outre mes cheveux. Quand je me déplaçais dans ma chambre, j’y laissais une traînée de cheveux. Partout où je passais, il y avait des cheveux. Je supportais cela très difficilement. Sans cheveux, je ne me sentais plus être moi-même. J’avais perdu ma fierté. Heureusement, mes cheveux ont poussé à nouveau. Je me sentais redevenu Johan !
ÉMOTIONS
"Oui, j'ai fumé. Alors je me le dois !"
Je fumais dès mes 12 ans, pour faire le bravache ! Pendant plus de 50 ans, j’ai beaucoup fumé. Et quand on est tabacomane, on ne peut pas s’arrêter simplement. Mais lorsque le docteur m’a dit que j’avais un cancer, j’ai demandé à mon fils de jeter toutes les cigarettes hors de notre maison. Du jour au lendemain, j’ai arrêté de fumer. C’était très facile. Quand on est au pied du mur, ça va manifestement beaucoup mieux.
Je ne comprends que trop bien que je doive mon cancer du poumon à ma tabacomanie. Je ne veux d’ailleurs pas qu’on s’apitoie sur moi à cause de cela. Je dis toujours : c’est bien fait pour moi. Je n’aurais pas dû fumer. Pour ma femme, c’était plus difficile d’accepter le diagnostic. C’était surtout le fait que je rejetais la faute sur moi-même, qui était dur pour elle. Elle pleurait, moi pas. Car je sais que c’est de ma propre faute.
FAMILLE & AMIS
"Je parle à présent beaucoup plus avec ma femme."
Je suis devenu un autre homme. Jadis, je n’aurai jamais fait une interview comme celle-ci. Je me serais tu et j’aurais regardé de quel côté venait le vent. Maintenant, j’ose parler de moi-même. Pourquoi pas ? Pourquoi d’autres ne pourraient-ils pas savoir que j’ai un cancer ? En ce sens, je suis devenu beaucoup plus sociable.
Lors du début de ma maladie, la relation avec mon fils était assez tendue. Il me reprochait d’avoir moi-même causé le cancer. Je n’aurais pas dû fumer ! Il n’a bien sûr pas tort. Mais ces derniers temps, nous sommes devenus beaucoup plus proches l’un de l’autre. J’ai un meilleur contact avec lui et je vais bientôt lui apprendre à conduire une auto. J’y aspire déjà. La relation avec ma femme s’est également approfondie. Nous échangeons beaucoup plus. Notre lien est devenu plus fort. C’est normal, sachant tout ce que nous avons dû surmonter ensemble.
SANTÉ ET FORME
"Grâce à l’immunothérapie, le cancer ‘dort ’."
Après cette période difficile de la chimiothérapie, nous avons commencé l’immunothérapie. Et cela va beaucoup mieux. Toutes les trois semaines, je passe à l’hôpital de jour pour ma cure. Je ne sais pas comment ça fonctionne précisément. Mais on me dit que le cancer se ‘ ratatine ’ et qu’il dort. Je pense que c’est pour cela que je ne passe de scanner qu’après chaque série de 5 sessions. On vérifie alors que le cancer ne reprend pas son activité. Jusqu’à présent la tumeur poursuit son sommeil, tandis que moi je vais mieux.
Je n’ai pas besoin de connaître les résultats du scanner pour savoir comment je vais. Je sens dans mon corps que je fais des progrès. Ainsi, je peux déjà marcher plus longtemps qu’il y a quelques mois. Avant, je ne pouvais pas aller à pied du parking jusqu’à l’hôpital de jour. À présent, je le fais sans m’arrêter ne fut-ce qu’une seule fois. J’ai une carte de stationnement pour personnes handicapées, mais je n’en ai pas besoin.
Actuellement, je suis prépensionné, mais ma femme travaille toujours. Cela signifie que je fais la plupart des tâches ménagères : je cuisine, nettoie, fais la lessive... Et ça va très bien. Ce n’est que lorsque je travaille dans le jardin, que je sens que je n’ai plus la forme d’antan. Même si cela va aussi de mieux en mieux.
Vous devez savoir que, pendant la période des sessions de chimiothérapies, mon fils a régulièrement dû m’aider à me lever, car je n’en n’avais moi-même pas la force. En me souvenant de cela et en sachant tout ce que je peux faire actuellement... je me rends très bien compte du fait que je reviens de loin.
Mon médecin ne me demande pas spécifiquement de faire plus d’activités physiques. Je sens moi-même que cela me fait du bien. Quand je suis plus actif, j’ai meilleur appétit et je me sens simplement mieux.
RÉGIME ET ALIMENTATION
"Mon objectif est 70 kg !"
Je vais vraiment mieux, à présent. Je le sens simplement dans mon corps. Je prends par exemple à nouveau du poids. À l’époque de cette lourde chimiothérapie, je pesais à peine 54 kg. Je ne pouvais presque plus manger, car on ne me donnait que des aliments liquides. Mon objectif, c’est de regagner mon poids de 70 kg. On y est presque ! Entre-temps, je mange à nouveau tout ce que je veux. Un hamburger-frites ? Volontiers !
UNE VOLTE-FACE
J’ai changé. Jadis, je ne m’arrêtais pas à ce qui se passait dans ma vie. Je vivais très superficiellement. Ce n’est plus le cas maintenant ! À présent, je réfléchis davantage sur ce que je vis. J’ai fait volte-face. J’ai également une approche beaucoup plus positive que jadis.
Je souligne maintenant le bon côté de tout. Y a-t-il un contretemps ? Tant pis. Je dois simplement essayer de l’accepter. Attention… cela n’est pas toujours facile. J’ai aussi mes journées lourdes. Mais j’essaie de ne pas perdre courage.
L’AVENIR AU YEUX DE JOHAN
"Je peux me féliciter d’être toujours là."
L’avenir pour moi ? Je le considère d’une manière positive. J’espère pouvoir vivre encore quelque temps. Peut-être pourrai-je voir encore l’enfant de mon fils. Mon petit-fils ! Quel bonheur !
À l’époque, je ne lisais pas beaucoup. Maintenant je dévore tout ce qui est écrit sur ma maladie. Je constate alors que l’on entend beaucoup de récits pessimistes sur le cancer. Ça se termine souvent mal. Mais cela ne correspond pas à mon expérience personnelle, qui est au contraire positive. J’envisage l’avenir d’un regard optimiste.
Je comprends de plus en plus que je peux me féliciter. Je suis reconnaissant de pouvoir vivre encore. De pouvoir faire aujourd’hui cette interview !